mardi 1 décembre 2015

Assises debout - Commençons la transition

Commençons la transition !


Intervenants : Gérard Dieudonné, maire de La Lucerne-d’Outremer ; Frédérique Sarazin, médecin ; Guillaume Hédouin, responsable de la maison du parc des marais du Cotentin, EELV ; Yves Graal, Manche-Nature.

Animateur : Miloud Mansour 


L’eau que nous consommons, le bio et les circuits courts dans les restaurations collectives, la survie des écosystèmes du bocage qui nous entoure, tout est lié. Vu par un élu, un médecin, un responsable politique ou un défenseur de la biodiversité, le constat est très similaire. Il faut réagir et prendre en main notre environnement, de façon individuelle et collective, et ne pas le laisser aux mains des administrations ou des entreprises privées.



Frédérique Sarazin

C’est après avoir vu un hélicoptère pulvériser des produits phytosanitaires au-dessus de sa tête qu’elle a rejoint le collectif Alerte danger pesticides. Certains patients habitent près de champs et de vergers, et cela peut provoquer des pathologies variées.

Avec Manche Nature, ils ont été surpris par la présence d’un perturbateur endocrinien (molécule qui perturbe les hormones), l’octylphénol, dans la baie du Mont-Saint-Michel et la baie des Veys, sachant qu’une seule goutte dans une piscine olympique peut perturber les hormones et que, lorsque plusieurs perturbateurs sont mélangés, l’action de chacun s’amplifie.

Ce sont les industriels qui ralentissent la diffusion des connaissances.

Il faudrait prendre une grande mesure de réduction des pesticides, or, au contraire, actuellement, leur usage s’étend.

Les sénateurs ne sont pas très à l’écoute ; d’ailleurs, ils ont voté contre l’introduction de l’agriculture biologique dans les cantines, alors que cela pourrait être fait progressivement.

Pour la qualité de l’eau, les petites crevettes, qui sont des bio-accumulateurs, pourraient être utilisées comme marqueurs très économiques. Les bulots et les tourteaux, eux, concentrent les métaux lourds mais aussi les pesticides.

La solution peut déjà être individuelle : en mangeant bio, ce qui n’est pas forcément plus cher pour manger plus sain, et en arrêtant de se laver ! Ne plus utiliser de pétrole, de gel douche, mais de l’eau !

L’État, au lieu d’abandonner la nature, devrait financer les associations qui défendent l’environnement.



Gérard Dieudonné

La production d’eau potable a été confiée à des régies. L’agence de l’eau Seine Normandie un cinquième de la France ne passe de conventions avec les collectivités que si elles ont signé la charte de non-utilisation des pesticides.

Il est possible de ne pas utiliser de produits phytosanitaires, mais c’est compliqué. Dans les cimetières, par exemple, on utilise des désherbants depuis les années 1950.

Des résistances se mettent en place, car il faut de plus en plus de produits pour obtenir des résultats.

Les collectivités doivent donner l’exemple. Le département a commencé…

Dans l’agriculture, peut-on envisager le zéro phyto ? Le bio ? Les agriculteurs sont-ils contre ?

Parmi les polluants classiques que l’on trouve dans l’eau, ceux qui semblaient le plus dangereux ont été éliminés. Sur le territoire du Granvillais, il y a moins de problèmes que dans le Sud-Manche…

Des progrès ont été faits, mais il faut rester attentifs.

On n’est pas obligé de mettre des produits pour cultiver, mais ce n’est pas dans la culture de l’agriculture actuelle.

Il y a également le problème de la qualité de l’eau en provenance des rivières.

Pour l’eau potable, il est possible de créer, au sein d’un gros syndicat mixte de production d’eau potable (SMPGA), une régie pour regrouper certaines structures autonomes.

Le but est d’essayer de maîtriser la production, les prix, surtout en milieu rural, où se pose un problème de distribution (de 11 à 80 abonnés au kilomètre).

Veolia est forcément plus cher puisque c’est une entreprise qui doit faire des bénéfices.



Guillaume Hédouin

Le bocage normand commence à suivre le modèle breton, qui gagne le Sud-Manche, avec une agriculture industrielle, paysages « ouverts », polluants d’origine agricole qui arrivent très vite dans les eaux, provoquant un « effet cocktail » dû à l’augmentation des molécules en nombre et en puissance.

Il n’existe pas de bonne étude publique ; c’est dans le cadre d’études épidémiologiques que les dégâts s’observent, pendant que les fabricants de produits phytosanitaires gagnent des années et ont toujours un produit d’avance.

Même si, dans une société idéale, on n’empêche pas l’effet nitrate, les zones humides actives sont plus efficaces pour la dégradation de l’azote.

Actuellement, on accélère le transit de l’eau. Or, la protection de l’eau s’effectue au niveau des 30 à 40 premiers centimètres du sol, et c’est l’agriculture qui s’en occupe. On peut dire que notre service public de l’eau commence avec l’agriculteur.

Dans les marais du Cotentin et du Bessin, beaucoup d’eau potable se situe dans les nappes, alors que, dans le Sud-Manche, on prend de l’eau de surface, on prend soin de l’eau.

Dans les marais du Cotentin et du Bessin, il faudrait développer une agriculture qui prenne soin de l’eau.

Ailleurs, on ferme les points de captage et on met de gros tuyaux.

On a un système concentrationnaire de l’eau, on augmente la taille du marché et des entreprises, avec la tentation de tout régler au niveau départemental pour générer du business.

Même les plantes sont victimes de la mondialisation : des plantes importées des quatre coins du monde, car le marché est mondialisé, avec leurs maladies (le frêne, par exemple) qui se disséminent ici.

La population est attachée au bocage, mais les agriculteurs veulent de grandes surfaces lisses pour cultiver.

Le bocage, ce ne sont pas seulement des haies pour séparer les champs, mais une source écosystème et d’intégration économique.





Yves Graal

L’urgence est de se préoccuper du réchauffement climatique.

Que va-t-il advenir des marais du Cotentin, des marais de Bréville ?

La biodiversité est en danger : insectes, oiseaux, papillons, taupes...

Depuis 2015, les arbres (voir à Yquelon…) sont en train de mourir : hêtres, acacias, peupliers, châtaigniers sont malades.

Quelques mesures immédiates : découper les trottoirs et mettre de la terre ; utiliser le bois du bocage pour des chaudières à bois récupéré dans les collectivités.

Difficile de terminer sur une note optimiste



Discussion




Frédérique Sarazin

La santé des hommes est liée à la santé de la nature.



Jean-Louis Brault (éleveur de porcs à la retraite)

Ne pas opposer l’agriculture bio et l’agriculture raisonnée, car les agriculteurs sont les premiers touchés.

On est tous conscients, surtout les jeunes agriculteurs. Mais pour ceux qui ont fait des investissements extrêmement lourds, on ne peut pas changer du jour au lendemain.

Les produits doivent être payés à leur juste valeur, car des agriculteurs bien rémunérés ont tendance à prendre les bonnes décisions pour l’environnement.

Il y a des améliorations, il faut du temps, des moyens, des prix…, favoriser les produits faits en France pour que les agriculteurs vivent dignement.

Quant aux nitrates, les agriculteurs utilisent des pièges à nitrates... Il n’y a pas de terres découvertes à l’automne dans le Sud-Manche.



Gérard Dieudonné

Il n’y a pas d’opposition, mais les agriculteurs votent pour des représentants syndicaux départementaux qui…



Pierre Hédouin (ancien marin pêcheur)

La solution n’est pas de mettre en cause les professionnels, mais de les mettre devant leurs responsabilités. Aujourd’hui, certaines espèces de poissons sont menacées.



Joseline Peyry (enseignante retraitée)

Quand on parle d’écologie, on stigmatise souvent les agriculteurs. Mais il ne faut pas opposer les uns aux autres. On ne fera pas du « commun » en soulignant des antagonismes.



Frédérique Sarazin

Il est difficile de changer de pratique, c’est vrai aussi pour les médecins.



Robert Brégeon

Soulève la question de la destruction des barrages qui permettent la production d’électricité hydraulique.

Yves Graal: Manche Nature choisit la vie

Frédérique Sarazin : la production de ces barrages est infime, même EDF veut les abandonner.

Que faire des sédiments pollués



Thomas Collardeau

Pour le bio à l’école.

Problème de l’exonération de la taxe foncière sur cinq ans. Amendement en cours pour permettre aux maires de choisir la durée de cette exonération.



Didier Leguelinel

La qualité des eaux de baignade est importante pour les pêcheurs, car ce sont aussi les eaux de fraie des poissons.

La question est de traiter la qualité des eaux au lieu de s’en prendre aux marins-pêcheurs.

Pour les barrages, le retraitement va passer à la trappe… au détriment des poissons de mer ?

Les bulots ne sont pas les premiers porteurs de métaux lourds.

Il s’agit d’une taille de bulots et de lieux de pêche



Émilie Guillard (ancienne élue, déléguée d’un syndicat des Eaux)

Fermeture de point de captage, aucun travail auprès des agriculteurs.

Refus de prendre en compte le problème des nitrates en amont de l’agriculture.

Les élus sont prisonniers de leur électorat.



Gérard Dieudonné

Il y a une protection autour du point de captage.



Miloud Mansour

Ce débat a demandé un travail préparatoire de plusieurs mois.

Aucune réponse de la FNSEA ni du Crédit agricole.

Il ne s’agit pas de trouver un bouc émissaire, mais des solutions.

Ce débat n’est pas une grand messe, mais une confrontation de nos idées pour progresser tous ensemble.


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